11/01 — Cinq nouvelles armes pour lutter contre la criminalité

L’assemblée plénière du Parlement fédéral a adopté aujourd’hui le « projet de loi visant à rendre la justice plus humaine, plus rapide et plus ferme III » du ministre de la Justice Paul Van Tigchelt. Nous développons ci-dessous cinq éléments importants de ce projet de loi : (1) la nouvelle procédure accélérée pour les personnes arrêtées, (2) une répression plus ferme de la rébellion entraînant une incapacité de travail, (3) l’alourdissement des peines pour les violences commises à l’encontre de professions publiques et l’extension de la liste des fonctions sociétales, (4) la pénalisation de l’équipement d’un véhicule avec un compartiment caché et (5) la pénalisation du jet d’objets par-dessus les murs d’une prison.

  1. A nouveau une procédure accélérée pour les personnes arrêtées

Depuis plus de 20 ans, la justice belge ne peut plus recourir à la procédure accélérée en ce qui concerne spécifiquement les suspects arrêtés. La procédure a été introduite en 2000 mais la Cour constitutionnelle l’a annulée en 2002. Or, cette procédure peut constituer un moyen efficace pour infliger aux délinquants une sanction immédiate. Les dispositions du projet de loi approuvé aujourd’hui répondent à toutes les remarques formulées par la Cour constitutionnelle dans son arrêt. De plus, le Conseil d’État n’a pas exprimé d’objections juridiques. La nouvelle procédure accélérée pour les personnes arrêtées peut désormais être appliquée à des cas simples ne nécessitant pas d’enquête plus approfondie, comme en cas de prise en flagrant délit, de preuves par images caméras ou de faits avoués par leurs auteurs. La personne arrêtée doit accepter la procédure accélérée. La comparution devant le tribunal, avec l’assistance d’un avocat, peut avoir lieu à partir de cinq jours ouvrables après l’arrestation.

  1. La rébellion avec incapacité de travail sera punie plus sévèrement

La rébellion entraînant une incapacité de travail sera punie plus sévèrement. Si elle est commise par une personne utilisant une arme, elle est passible d’une peine d’emprisonnement de 3 à 5 ans ; sans arme, d’une peine d’emprisonnement de 6 mois à 3 ans. Si cette infraction est commise par plus d’une personne, il s’agit d’une circonstance aggravante que le juge devra prendre en compte lors de la détermination de la peine. Elle est d’application dès qu’il y a au moins un jour d’incapacité de travail.

  1. Alourdissement des peines en cas de violence à l’encontre de la police et d’autres fonctions sociétales protégées

Ensuite, un alourdissement des peines est prévu pour les actes de violence commis contre les policiers, les intervenants des services de secours ou d’autres fonctions sociétales. Par exemples, les faits de violence qui sont actuellement punis de 1 à 3 ans de peine d’emprisonnement, seront punis d’une peine plus sévère de 3 à 5 ans s’ils sont perpétrés à l’encontre de l’une ou l’autre de ces fonctions. En outre, le meurtre, la torture et les traitements inhumains seront ajoutés sur la liste des infractions passibles d’un alourdissement de peine. Sur la liste des fonctions sociétales sur laquelle figuraient déjà entre autres les policiers, les douaniers, les agents pénitentiaires, les pompiers, les secouristes, les médecins, les infirmiers, les accompagnateurs de train et les chauffeurs de bus, seront à l’avenir également repris les avocats, les notaires, les journalistes, l’ensemble des professionnels de la santé, les agents constatateurs SAC, les employés des CPAS et les médiateurs du travail, notamment du Forem. La protection des fonctionnaires de police sera étendue à l’ensemble des fonctionnaires de police, y compris à ceux qui travaillent à l’accueil et aux policiers qui ne sont pas en service.

  1. Jeter des objets par-dessus les murs de la prison est désormais punissable

Les directeurs de prisons constatent une augmentation du nombre de jets d’objets. Il s’agit de téléphones portables, d’armes ou de drogues jetés par-dessus les murs, avec ou sans drone. Les criminels condamnés pour trafic de drogue tentent de poursuivre leur commerce à l’intérieur des murs de la prison. Cette situation n’est pas seulement source de nuisances pour les riverains, mais aussi de tumultes et d’agressions à l’intérieur des murs de la prison lorsque des personnes tentent de se procurer ces articles. Jusqu’à présent, le fait de jeter un objet par-dessus les murs de la prison n’était pas punissable en soi. Si l’on ne pouvait pas prouver qu’il s’agissait d’objets illicites tels que de la drogue ou une arme, l’auteur du jet s’en tirait impunément. Raison pour laquelle, la criminalisation explicite du jet d’objets par-dessus les murs des prisons et des institutions psychiatriques s’imposait. La peine prévue est fixée à 15 jours à un an de prison assortie d’une amende de 400 à 4.000 euros. En cas de récidive, des peines plus lourdes sont possibles. Si des constatations sont faites en matière de drogue, par exemple, une condamnation supplémentaire pour infraction à la législation sur les stupéfiants peut suivre.

  1. Equiper des véhicules avec des compartiments cachés est désormais punissable

La police et le parquet constatent depuis plusieurs années que des gangs criminels équipent leurs véhicules de compartiments cachés pour transporter, à l’abri des regards, de la drogue, des armes ou de l’argent d’origine criminelle. Il est même question d’une industrie spécialisée dans le milieu criminel pour aménager ces compartiments cachés. Raison pour laquelle, le fait d’équiper ou de posséder une voiture avec un tel compartiment caché est désormais punissable. Cette infraction sera punie d’une amende pouvant aller jusqu’à 20.000 euros. Quiconque est en possession d’une telle voiture encourt une peine d’emprisonnement de 6 mois à 3 ans. Si l’on équipe des voitures avec des compartiments cachés en tant que profession illégale ou plusieurs fois de suite, la peine peut aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement.

Un certain nombre de ces mesures étaient déjà prévues dans le cadre de la discussion sur le nouveau Code pénal. Les discussions au Parlement sont encore en cours. En outre, l’entrée en vigueur est prévue deux ans après l’approbation par le Parlement, afin de donner à la police, à la Justice et aux autres services le temps de s’adapter au nouveau Code pénal. C’est pourquoi ces mesures en ont été extraites et font l’objet d’une entrée en vigueur accélérée. Cette loi sera bientôt publiée au Moniteur belge et s’appliquera avec effet immédiat.

Paul Van Tigchelt, ministre de la Justice : « Il s’agit d’une série de mesures que les membres de la police et de la Justice réclament depuis des années. Des armes efficaces pour intervenir plus rapidement et plus fermement à l’encontre des criminels. Nous n’attendons pas l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal pour les instaurer. La police et la Justice pourront y recourir dès maintenant. »