La solution aux nombreux kilomètres d’archives judiciaires : le dossier numérique

Les sous-sols des cours et tribunaux de notre pays contiennent de nombreux kilomètres d’archives judiciaires. Leur conservation et leur gestion nécessitent beaucoup d’espace et de temps. De plus, plusieurs caves d’archives ont également connu des problèmes de moisissures sur les dossiers au cours des dernières années. Et les inondations en Wallonie en 2021 n’ont pas non plus épargné les archives de la Justice. La loi relative à la digitalisation du ministre de la Justice Van Quickenborne, récemment adoptée par le gouvernement, devrait résoudre structurellement de nombreux problèmes matériels et logistiques à long terme. Les tribunaux pourront conserver leurs dossiers pénaux, et donc leurs archives, entièrement digitalisés. En outre, les directives existantes en matière de conservation des archives seront remaniées, permettant enfin de supprimer les archives. 

Les documents judiciaires doivent être conservés suffisamment longtemps pour assurer le bon fonctionnement de la Justice et la sécurité juridique de toutes les parties. Dans l’ensemble des cours et tribunaux de notre pays, des dizaines de kilomètres d’archives sont conservés, ce qui prend beaucoup de place et demande un grand investissement en termes de temps de la part des greffiers. De plus, les archives de la Justice s’enrichissent chaque année. Les délais de conservation des archives dépendent du type de juridiction. En matière correctionnelle, par exemple, le délai est de 20 ans. 

À l’expiration des délais de conservation, les archives sont détruites parce qu’elles n’ont plus de raison d’être sur le plan administratif et juridique. En 2022, par exemple, plus de 10 kilomètres d’archives judiciaires ont été détruits. Les archives à valeur historique, en revanche, doivent être transférées pour conservation permanente aux Archives de l’État, l’institution scientifique fédérale responsable de la conservation permanente, de la divulgation et de la mise à disposition des archives des administrations publiques. En 2022, 2,6 kilomètres d’archives judiciaires ont été transférés aux Archives de l’État. Il s’agit notamment des dossiers de la cour d’assises et des dossiers d’internement. 

Une méthode d’archivage devenue insoutenable 

Dans certains endroits, des problèmes de conservation des archives se posent depuis des années. Des problèmes d’humidité dans les sous-sols de certains palais de justice ont entraîné la formation de moisissures sur les dossiers. Les inondations de l’été 2021 en Wallonie ont également causé des dégâts aux archives judiciaires, par exemple à Verviers. Quelque 250 mètres linéaires d’archives se sont retrouvés sous l’eau. Le ministre de la Justice Van Quickenborne a ensuite libéré des budgets pour faire restaurer les documents endommagés. Les dossiers à transférer aux Archives de l’État ont été nettoyés, désinfectés et conservés dans des boîtes non acides.   

La méthode de travail actuelle, avec des dossiers entièrement sur papier, est dépassée et de moins en moins justifiable en termes de déploiement du personnel, de santé sur le lieu de travail, de gestion efficace des bâtiments, de maîtrise des coûts d’entretien et de consommation de papier. Le ministre Van Quickenborne a donc travaillé à une solution numérique pour que l’archivage des dossiers de la Justice puisse résister à l’épreuve du temps. Le projet de loi à ce sujet a été approuvé par le Conseil des ministres. 

L’archivage numérique, une solution à long terme 

Dans le Code d’instruction criminelle, certains passages seront modifiés afin qu’un dossier pénal puisse désormais être créé et conservé de manière entièrement numérique, sans aucun document papier. Il s’agit notamment de dispositions relatives aux signatures électroniques et aux sceaux numériques, à l’authenticité et à l’intégrité des documents numériques, à la conservation et à l’archivage des documents numériques, aux règles relatives aux documents papier numérisés (scannés), à la création des bases de données nécessaires, etc. La législation actuelle prévoit encore souvent explicitement que certaines formalités doivent être accomplies, par exemple, par lettre recommandée, avec cachet sur farde ou avec une signature. C’est pourquoi de nombreux articles de loi sont en train d’être modifiés pour ajouter l’option « par voie électronique ». 

Ces adaptations juridiques rendent possible une politique d’archivage numérique et devraient faire en sorte que de plus en plus de dossiers soient stockés et archivés numériquement. Ainsi, dans les cours et tribunaux, mais aussi dans les parquets, il y aura de moins en moins besoin d’espace d’archivage et de classement manuel. Au fur et à mesure que les délais de conservation viendront à expirer, des kilomètres supplémentaires d’archives seront détruits chaque année et la Justice aura ainsi de moins en moins d’archives papier à conserver. Le développement des applications et des bases de données nécessaires est déjà en cours.  

Toutes les entités de la chaîne judiciaire seront en mesure de gérer les dossiers de manière entièrement numérique d’ici fin 2024. Au cours des premier et deuxième trimestres de cette année, les parquets de police, les parquets correctionnels, les auditorats du travail, le parquet fédéral, le parquet de la sécurité routière, les tribunaux de police, les tribunaux correctionnels et les cours d’appel ont obtenu l’accès au dossier numérique. Cela correspond à environ 8 000 employés. L’année prochaine, ce sera au tour des parquets et tribunaux de la jeunesse, et du parquet général. La majorité des autorités civiles disposent depuis un certain temps d’une solution numérique pour la gestion numérique des dossiers. Les autres instances seront connectées dans le courant de 2024. JustDeposit, l’outil de dépôt numérique de documents sur just-on-web.be, est toujours intégré.  

Le projet de loi joue un rôle essentiel dans la transition vers un mode de travail purement numérique. Un flux parallèle de dossiers papier, comme c’est le cas aujourd’hui, ne sera plus requis par la loi à compter du 1er janvier 2024. Le dossier numérique réduira non seulement de manière progressive les archives, mais assurera également des gains d’efficacité globaux, un meilleur service et des économies de coûts. Cela devrait produire un effet multiplicateur sur le fonctionnement de la Justice. 

Nouvelles directives sur les délais de conservation 

Afin de rationaliser les règles de gestion des archives, le ministre Van Quickenborne a modifié la circulaire contenant les directives relatives aux délais de conservation et les critères de sélection des archives des cours et tribunaux. Ceci a été fait en collaboration avec les Archives de l’État et sur la base des suggestions des nombreux greffiers en chef et secrétaires en chef. La version précédente des directives datait de 2017. Cette révision entraînera également la destruction de plusieurs kilomètres d’archives dans les années à venir et une utilisation plus efficace de l’espace de stockage, du personnel et des ressources disponibles. On estime que les gains les plus importants seront réalisés dans les justices de paix, les tribunaux du travail et les sections civiles des tribunaux de première instance.  

Vincent Van Quickenborne, vice-Premier ministre et ministre de la Justice : « La Justice possède des dizaines, voire des centaines de kilomètres d’archives, mais personne ne sait exactement combien. Il faut énormément de temps et d’espace pour conserver et préserver toutes ces archives. En outre, plusieurs endroits font face à des problèmes de moisissures depuis bien longtemps. Cette méthode d’archivage est tout à fait dépassée et insoutenable en termes de personnel, de santé sur le lieu de travail, de gestion efficace des bâtiments, de coûts d’entretien et de consommation de papier. Maintenant que nous offrons enfin la possibilité de créer et de stocker des dossiers entièrement digitalisés, nous apportons une solution structurelle à ce problème à long terme. À terme, plus aucun dossier papier ne sera stocké dans les sous-sols des cours et tribunaux. » 

Karel Velle, Archiviste général de l’État : « Les initiatives du ministre de la Justice constituent un grand pas en avant, tant pour les différentes autorités que pour le citoyen et pour la recherche (historique) future. Les projets de digitalisation sont l’un des nombreux exemples de bonne coopération entre les Archives de l’Etat et le ministère de la Justice depuis plus de 20 ans. »