Les procédures judiciaires entamées par le secteur sportif ont fait chou blanc : la limitation drastique de la publicité pour les jeux de hasard entrera en vigueur le 1er juillet

L’arrêté royal du ministre de la Justice Van Quickenborne, visant à limiter considérablement la publicité pour les jeux de hasard en Belgique, entrera en vigueur le 1er juillet. Plusieurs tribunaux de première instance en Flandre et à Bruxelles, devant lesquels des acteurs du secteur sportif ont séparément introduit des procédures en référé, ont déjà rejeté l’urgence de ces procédures. Une ordonnance récente du tribunal de première instance de Tournai, qui a immédiatement statué sur le fond, ne fait pas droit aux clubs sportifs et certaines sociétés de jeux de hasard. Dès lors, rien ne s’oppose à son entrée en vigueur dans les jours qui viennent.  

De nombreux compatriotes luttent contre une addiction au jeu, ce qui a de graves conséquences financières, mentales et sociales. Des récits stupéfiants de joueurs ayant accumulé des montagnes de dettes en perdant au jeu la totalité de leurs comptes bancaires et ceux des membres de leur famille sont apparus fréquemment dans les médias au cours de ces dernières années. Selon des études internationales, le groupe des joueurs à problèmes finance jusqu’à 40 % du chiffre d’affaires des entreprises de jeu de hasard. Les profits du secteur sont donc réalisés sur le dos de personnes souffrant d’une addiction. On constate que les accros au jeu dépensent en moyenne 42 % de leur revenu mensuel au jeu.  

Le nombre de personnes dans notre pays qui ont volontairement demandé à être placées sur la liste des personnes exclues de la Commission des jeux de hasard a augmenté de 70 % par rapport à 2014. Ceci est particulièrement inquiétant, si l’on considère l’énorme impact de la publicité pour les jeux de hasard sur le joueur dépendant et les membres de sa famille. Les témoignages de dépression, d’isolement, d’éloignement des membres de la famille et même de tendances suicidaires dues à la dépendance au jeu et aux problèmes financiers sont légion. Une étude suédoise avait déjà montré que le risque de suicide en cas d’addiction au jeu est quinze fois plus élevé.  

Mesure efficace 

Une étude belge de 2017 indique qu’un joueur dépendant sur trois déclare que la publicité pour les jeux de hasard l’incite à jouer encore plus. La recherche scientifique, confirmée par un rapport de 2017 publié par le Conseil supérieur de la santé, montre également que la limitation de la publicité pour les jeux de hasard est une mesure préventive très efficace pour lutter contre l’addiction au jeu. Comme prévu dans l’accord de gouvernement, le gouvernement prend des mesures pour lutter contre l’addiction au jeu et les dettes de jeu.  Malgré les promesses réitérées du secteur des jeux de hasard disant qu’il ne ciblerait pas sa publicité sur les personnes vulnérables et les accros au jeu, ces engagements sont trop souvent restés lettre morte dans la pratique.  

C’est pourquoi le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne, limite par le biais d’un arrêté royal autonome la publicité pour les jeux de hasard qui a atteint des proportions excessives ces dernières années. Les jeux de hasard resteront possibles, mais les principales formes de publicité pour ces jeux seront limitées. Les circonstances dans lesquelles la publicité pour ces jeux reste autorisée seront strictement définies.   

Quelle publicité pour les jeux de hasard ne sera plus autorisée à partir du 1er juillet 2023 ?  

  • Les spots publicitaires à la télévision, à la radio et dans les salles de cinéma  
  • Les messages publicitaires sur les sites web, tels que les sites d’information par exemple  
  • Les annonces sur les médias sociaux  
  • Les annonces dans des magazines ou des journaux  
  • Les affiches publicitaires dans les lieux publics (panneaux publicitaires, abribus, autocollants sur les devantures de magasins de journaux, etc.)  
  • La publicité personnalisée par courriel, poste, services de messagerie tels que Whatsapp, SMS ou médias sociaux  
  • Tous les imprimés publicitaires  

Quelle publicité pour les jeux de hasard est encore autorisée ?  

  • Les nom et logo sur la façade d’un casino, d’une salle de jeux ou d’une agence de paris   
  • La publicité à l’intérieur d’un casino, d’une salle de jeux ou d’une agence de paris  
  • La publicité sur son propre site de jeux de hasard  
  • Les posts non sponsorisés sur les propres comptes des médias sociaux   
  • La publicité SEO pour ceux qui recherchent spécifiquement un fournisseur de jeux sur les pages de recherche  

En outre, des règles éthiques et formelles strictes auxquelles doivent se conformer les autres formes de publicité pour les jeux de hasard seront définies. Ainsi, il n’est plus permis d’utiliser des personnes ou des slogans dans la publicité pour les jeux de hasard.   

Période de transition pour le secteur sportif  

  • À partir du 1er juillet 2023, le sponsoring sportif sera également limité. Toutefois, une période de transition est prévue pour respecter les contrats en cours. Par exemple, le secteur du sport ne pourra afficher le logo et le nom de la marque que sur le lieu où le sport est pratiqué et sur le maillot.
  • À partir du 1er janvier 2025, toute publicité pour les jeux de hasard sera interdite dans les stades (bannières, affiches, panneaux publicitaires, spots publicitaires). Une exception sera faite pendant la période de transition allant jusqu’au 31 décembre 2027 : seul un logo avec le nom, mais sans slogan, pourra être placé sur le maillot. La surface dédiée à cet effet ne pourra pas dépasser les 75 cm² (7,5 cm x 10 cm) et ne pourra pas figurer sur la partie avant du maillot.  
  • À partir du 1er janvier 2028, le sponsoring de maillots ne sera autorisé que pour les clubs sportifs amateurs et dans des conditions strictes. Pour les clubs sportifs amateurs, ce type d’affichage sera toujours possible sur une surface maximale de 50 cm². Cependant, les règles fiscales se durcissent dans la mesure où les dépenses de sponsoring ne seront plus déductibles pour les sociétés de jeux de hasard.  

Procédures devant le tribunal  

Le projet d’arrêté royal a été soumis à la Commission européenne et au Conseil d’État pour vérifier sa conformité au droit belge et européen. Les avis reçus par le ministre Van Quickenborne ne révèlent aucune objection particulière qui indiquerait que les mesures prises sont illégales ou disproportionnées.  

Pourtant l’industrie du sport annonçait le 24 mars 2023 qu’elle contesterait l’arrêté royal. La ProLeague et la BeneLeague ont saisi le tribunal néerlandophone de première instance de Bruxelles pour faire suspendre l’arrêté royal en référé. En outre, le secteur sportif a également tenté d’attaquer l’AR par d’autres moyens. Plusieurs autres clubs sportifs et certaines sociétés de jeux de hasard ont simultanément engagé des procédures auprès de 11 tribunaux de première instance différents à travers le pays. La démarche consistant à engager autant de procédures distinctes que possible devant différents tribunaux avait vraisemblablement pour objectif de maximiser leurs chances de succès dans l’espoir d’obtenir un jugement favorable quelque part. Les clubs concernés sont le RFC Anvers, le Club de Bruges, le Cercle de Bruges, le KRC Genk, le Standard de Liège, le Sporting Charleroi, l’OH Louvain, le KAA Gand, Zulte-Waregem, le Yellow Red KV de Malines, le KV Courtrai, le RFC Seraing, le Racing de Molenbeek, le Brussels Basketball, le GS Wallonie Bruxelles et Continuum Sports Belgium.  

Le tribunal néerlandophone de première instance de Bruxelles n’a pas fait droit à la ProLeague et à la BeneLeague. Le tribunal a estimé qu’il ne pouvait être question d’urgence pour réclamer la suspension de l’arrêté royal. Les dispositions transitoires relatives au sponsoring sportif qui seront en vigueur jusqu’au 31 décembre 2027, devraient être suffisantes pour permettre au secteur du sport de se mettre en ordre, telle fut la motivation. Le même raisonnement a été suivi dans les causes introduites par le Club de Bruges, le Cercle de Bruges, OH Leuven, KV Kortrijk, KRC Genk et Napoleon Games.  

Les causes introduites par le RFC de Seraing, le Standard de Liège, le Racing de Molenbeek, Brussels Basketball, Continuum Sports Belgium, Golden Palace et SA Gambling ont toutes été renvoyées devant le tribunal de Tournai. Ce dernier a accepté l’urgence et s’est donc immédiatement prononcé sur le fond. Le tribunal n’a pas fait droit aux clubs sportifs et aux sociétés de jeu. Le tribunal a estimé, comme le Conseil d’État dans son avis du 12 octobre 2022, que l’AR poursuit un objectif légitime d’intérêt public et que les mesures prises sont proportionnées et efficaces. L’arrêté royal peut donc entrer en vigueur.  

Application de la loi  

La Commission des jeux de hasard est chargée de veiller au respect des règles prévues dans l’arrêté royal. Lorsque des infractions sont constatées, l’amende administrative peut atteindre 200.000 euros. Non seulement les opérateurs de jeux risquent une amende, mais aussi toute personne impliquée dans la diffusion de publicité pour les jeux de hasard. Toute personne constatant des irrégularités ou des violations flagrantes des nouvelles règles en matière de publicité pour les jeux de hasard peut les signaler en utilisant le formulaire de contact disponible à l’adresse www.gamingcommission.be/contact.  

Vincent Van Quickenborne, ministre de la Justice : « Je suis heureux de constater que le juge confirme que cette limitation drastique de la publicité pour les jeux de hasard est une mesure proportionnée et légalement fondée. Il faut espérer que cela mettra fin à toutes les tentatives de lobbying et de sabotage juridique de la part du secteur des jeux de hasard et des secteurs dépendants de l’argent des jeux. Il est temps que tout le monde accepte la nouvelle réalité : à partir du 1er juillet, fini le bombardement de publicité pour les jeux de hasard dans notre pays. À partir du 1er juillet, nous protégerons enfin pleinement les nombreux joueurs accros aux jeux et leurs familles de ses effets dévastateurs. Grâce à ces mesures, nous protégerons également les mineurs de son effet normalisant. C’est ce que le secteur de l’aide réclamait depuis des années. »