L’ensemble des décisions judiciaires disponible en ligne grâce à une base de données centrale

Dans une deuxième phase, tous les jugements et arrêts pourront être consultés par tous

La façon dont les jugements et arrêts sont rendus publics et consultables dans notre pays date encore du XIXe siècle. Dans de nombreux autres pays, nous constatons, cependant, que les choses peuvent être faites différemment, avec des bases de données en ligne contenant les décisions des cours et tribunaux. Le vice-Premier ministre et ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne veut remédier à cette situation. Vendredi dernier, le Conseil des ministres a approuvé son projet de loi en la matière. Il fournit un cadre juridique pour que toutes les décisions des cours et tribunaux soient disponibles sur une plateforme en ligne unique, ce qui entraîne des gains d’efficacité et de nouvelles possibilités d’analyse. Par phases, tous les jugements et arrêts, bien que pseudonymisés, deviendront accessibles en ligne à tous.

La publicité des jugements et arrêts est inscrite comme un principe fondamental dans notre constitution. Contrairement aux décisions du gouvernement, les décisions d’une cour ou d’un tribunal, en dehors des procédures d’appel, ne sont pas directement sujettes à contrôle par un organe tel que le parlement. C’est pourquoi le législateur constitutionnel a stipulé que la société doit pouvoir vérifier si les décisions et les motivations des juges sont conformes à la loi. Les arrêts doivent être prononcés publiquement et librement consultables. La façon dont cela est géré actuellement doit être mise à jour. Bien que les jugements soient prononcés oralement et, en matière pénale, également publiquement dans la salle d’audience accessible au public, les copies imprimées sont actuellement dispersées dans les cours et tribunaux du pays.

La constitution a d’abord été modifiée

Cela cause beaucoup de problèmes. Lorsque les magistrats veulent demander des jugements et arrêts d’autres arrondissements, cette demande entraîne une charge administrative et une perte de temps. Ils le font, par exemple, pour vérifier une jurisprudence antérieure similaire dans un certain domaine du droit ou pour rechercher des condamnations antérieures de suspects ou prévenus. Dans certains cas, les bases de données de jurisprudence privées sont utilisées, mais celles-ci ne contiennent qu’une fraction de tous les jugements et arrêts. De plus, les prévenus, les parties civiles et les avocats doivent encore se rendre au tribunal pour entendre le verdict. Ou bien ils doivent attendre que le jugement ou l’arrêt soit disponible pour consultation au greffe. Une copie est envoyée par la poste, mais cela prend plusieurs jours ou semaines. 

Afin de remédier à cette inefficacité, la constitution a été modifiée en avril 2019. Elle stipulait que toute décision judiciaire devait être communiquée en audience publique. Dans la version modifiée, le terme « audience publique » a été remplacée par « public ». La suppression du mot « audience » a ouvert la possibilité de publier une décision sur une plateforme en ligne.

Le Conseil des ministres approuve le projet de loi

À l’ère du numérique, avec une prestation de services rapide et conviviale, la justice ne peut pas rester à la traîne. Dès son entrée en fonction, le vice-Premier ministre et ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne a fait de la numérisation un fer de lance. Le ministre a soumis un projet de loi portant création d’une base de données centrale des jugements et arrêts au Conseil des ministres, qui l’a approuvé vendredi dernier. Le fonctionnement de la base de données proposée est très similaire à la base de données en ligne des jugements et arrêts aux Pays-Bas, à savoir ‘rechtspraak.nl’.

Après avis du Conseil d’État et de l’Autorité de protection des données, suivi d’éventuelles adaptations, le projet de loi sera soumis au parlement. L’intention est de l’approuver d’ici cet été afin que la base de données puisse entrer en activité début 2023. À partir de cette date, les juges y chargeront leurs jugements et arrêts. 

Accès aux magistrats et aux parties concernées, puis ouverture au public

Dans un premier temps, les magistrats pourront consulter les jugements et arrêts dans cette base de données. Les avocats, les prévenus, les parties civiles et les experts pourront également consulter numériquement les décisions dans leurs dossiers spécifiques. À part cela, la base de données centrale peut être utile lors d’instructions judiciaires et d’informations. Par exemple pour vérifier, à la demande d’un magistrat, si les noms de certains suspects sont apparus dans des jugements ou arrêts antérieurs, sans qu’ils soient suspects à l’époque. Pour éviter les abus, les magistrats doivent introduire au préalable une demande motivée.

Tout comme les arrêts sont actuellement affichés dans les cours d’assises, il est également prévu dans un premier temps que la base de données rende certaines décisions disponibles en ligne dans leur intégralité pour tout le monde. Il peut s’agir d’affaires d’assises telles qu’un assassinat, un homicide ou des faits de terrorisme. Dans les affaires correctionnelles, c’est plutôt exceptionnel, mais c’est possible dans des cas spécifiques. Par exemple, l’article 457 du Code pénal le prévoit explicitement dans les cas où des substances nocives seraient mélangées à des denrées alimentaires ou des boissons. Les noms ou les données pouvant conduire à l’identité des victimes ne sont jamais publiés. De cette façon, leur vie privée est protégée.

Dans la deuxième phase, tous les jugements et arrêts seront publiés publiquement et pourront être consultés par tous, grâce à un moteur de recherche performant. Les noms des personnes privées seront pseudonymisés, ce qui signifie qu’ils seront remplacés par des pseudonymes. Les noms des personnes morales, en revanche, seront préservés, comme c’est déjà le cas pour les décisions des tribunaux de l’entreprise. 

Confidentialité assurée

La confidentialité des personnes privées dans les jugements et arrêts repris dans la base de données consultable par le public est assurée grâce à la pseudonymisation de leurs noms. Mais cela ne s’arrête pas là, car chaque élément pouvant conduire à leur identification est également adapté. Cela doit se faire de manière automatisée, mais toujours sous contrôle humain. Les juges peuvent également décider d’omettre certains passages du jugement dans le jugement ou l’arrêt rendu public s’ils portent atteinte au droit à la protection de la vie privée. Si les parties intéressées estiment que les données peuvent néanmoins conduire à une identification, une demande de rectification est possible.

Approche axée sur les données pour une politique résiliente

Les avantages d’une base de données centrale sont évidents, avec pour conséquence directe une efficacité bien plus grande et un gain de temps pour les tribunaux, les parquets, les avocats, les prévenus et les parties civiles. La consommation de papier est également fortement réduite. Et les magistrats disposent de plus d’informations sur lesquelles fonder leurs décisions. La base de données permet également à la société de surveiller comment et selon quelle motivation le pouvoir judiciaire prend des décisions. Dans la lignée de ce raisonnement, la base de données centrale permettra également des analyses de données. Il sera, par exemple, possible de vérifier statistiquement comment les juges interprètent et appliquent certaines lois. Cette approche axée sur les données est utile pour le gouvernement ou le parlement afin d’adapter plus précisément la politique en matière de justice aux évolutions sociales. Entre-temps, le gouvernement a également donné son accord à la publication d’un marché public qui permettra le développement d’un logiciel pour la base de données et la pseudonymisation des jugements et arrêts. 

Vincent Van Quickenborne, vice-Premier ministre et ministre de la Justice : « Il s’agit ici d’une étape cruciale dans la numérisation de la justice. Rendre la justice plus rapide implique aussi que les décisions doivent être mises à la disposition du public de manière simple et transparente. Ensemble avec les professionnels chargés d’expliquer les décisions de justice, nous assurons la publicité des décisions telle que prévue par la constitution. »

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Dounia Boumaaza

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